La question qui revient le plus souvent quand j’explique qu’il est possible de vivre sans voiture est sans doute « Mais comment fais-tu pour les courses ? » Comment est-il possible de vivre sans un coffre assez grand pour transporter les courses du vendredi soir ?
Bien évidemment, pour transporter « les courses du vendredi soir », il y a le triporteur, une contenance plus grande que la plupart des coffres de voitures moyennes, tout rentre sans problème.
Pourtant, ça ne me semble pas être la meilleure solution. Je ne suis pas « anti-consommation », je fais même partie des gros consommateurs mais j’ai beaucoup de mal avec ces entrepôts de tout et de rien entourés par leurs immenses parkings qui viennent enlaidir des bouts de campagne à l’extérieur des villes que l’on appelle « centres commerciaux ».
Ces véritables temples du tout voiture représentent tout ce qui me dérange : un déplacement motorisé pour aller se garer au milieu d’innombrables colonnes de voitures avant d’aller piétiner dans un endroit dédié à la consommation hors de toute réalité de vie en effectuant trois pas pour passer du pain à la machine à laver et du paquet de pâtes au dernier roman best seller avant d’aller faire la queue avec son plein de courses et passer devant un hôte ou une hôtesse de caisse qui lève à peine les yeux et qui n’attend que la fin de sa journée épuisante, pour retourner à sa voiture, vider son chariot et rentrer chez soi en regardant un triste décor de périphérie de ville à travers une vitre en plexiglas.
Très peu pour moi !
Je leur préfère les flâneries à pieds en centre-ville, les petites boutiques, les échanges avec les commerçants, les créations de certains artisans et la proximité des lieux de ravitaillement.
Vous n’avez peut-être pas tout ça à proximité si vous vivez dans un endroit isolé : c’est un problème et non une raison.
Les petits commerçants, les boutiques et les artisans existaient également en nombre dans les campagnes fut une époque, mais la centralisation des temples du tout voiture où tout le monde se retrouve après un trajet d’automobile pour faire son plein a créé des déserts commerçants.
On préfère aujourd’hui faire 10 km pour se retrouver face à un rayon froid en métal pour choisir parmi 10 marques de fromage créés industriellement de la même façon avec le lait de vaches entassées qu’aller chez le fromager en bas de chez soi pour échanger et discuter.
Loin d’avoir apporté une solution à un problème qui n’existait pas, on a créé une nouvelle dépendance et un nouveau problème : ne pas avoir de voiture devient handicapant pour consommer. Les familles nombreuses existaient bien avant l’apparition de ces magasins géants : cette centralisation a créé un besoin de déplacement et d’équipement de transport alors que tout était en bas de la rue.
Chacun consomme bien ce qu’il veut selon ses idées, ses envies et son budget, mais plus que réfléchir à ce que l’on consomme, peut-être est-il intéressant de penser à la façon dont on le fait et aux habitudes quotidiennes que ça engendre.