Réflexion sur le transhumanisme : le côté indispensable de l’automobile

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Il existe un bon nombre d’alternatives à l’automobile, parmi lesquelles les transports en commun et les modes de transports actifs (vélo, roller, marche à pieds).

Mais malgré la promotion de ces différents types de déplacement, la voiture reste indispensable dans l’esprit de la majeure partie de la population occidentale.

Devant le nombre de personnes persuadées par cette idée, on pourrait se demander s’il faut être complètement déconnecté de la réalité pour imaginer qu’une vie sans voiture puisse être parfaitement possible pour la plupart des gens.

Je pense que le problème est pris à l’envers.

En y réfléchissant bien, l’idée semble farfelue : comment en est-on arrivé à penser qu’un objet coûtant un tel prix puisse être indispensable à la vie des gens ? Comment en est-on arrivé à penser que se passer d’un objet qui coûte tant d’argent puisse être un luxe ? Ou qu’à l’inverse, l’obligation de s’en passer pour ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder à la possession d’un tel objet puisse être synonyme de marginalisation de la société ?

Et comment en est-on arrivé à penser que l’espace à taille humaine puisse être insuffisant au bien être des gens ?

Il y a deux cas d’absence automobile : ceux qui l’ont abandonnée et ceux qui n’en ont jamais eu.

Deux cas et deux façons de penser opposées :

– L’automobiliste repenti va se poser la question ainsi : « comment est-ce que je vais pouvoir continuer à aller à la salle de sport de la commune voisine si je n’ai plus de voiture ? Il va falloir que je trouve d’autres solutions, voir si un transport en commun permet d’y aller ou si le trajet est réalisable à vélo. Comment vais-je pouvoir transporter mes courses du vendredi soir ? Il va falloir que je trouve d’autres solutions, voir si certains types de vélos me permettraient de transporter de grosses charges. Comment vais-je partir en vacances ? Il va falloir que je vérifie si le train me permet de remplacer mon trajet automobile pour me rendre dans la ville où j’ai décidé d’aller »

– La personne qui n’a jamais eu de voiture va se poser la question ainsi : « j’habite à tel endroit, quelles sont les activités disponibles autour de chez moi ? Quelles sont les activités accessibles à vélo ? Et jusqu’où me permettent d’aller les transports en commun ? Quelles charges suis-je capable de transporter avec mon vélo ou à pieds ? Vais-je pouvoir continuer à aller voir telle personne si je m’éloigne de telle distance ? Qu’y a-t-il d’intéressant à voir dans mon coin ? Et à quels endroits m’amènent les trains disponibles pour les vacances ? »

Et c’est là que toute la différence se fait. Une fois qu’on a établi son mode de vie par rapport à la voiture, il faut revoir sa façon de vivre ou alors trouver des moyens alternatifs de déplacements qui peuvent être contraignants : aller à la salle de sport de la commune voisine sans transport en commun quand celle-ci est à 50 km, oui, c’est très contraignant. Certaines solutions comme le vélo électrique peuvent être des alternatives crédibles mais le but reste ici de combler le manque d’un mode de vie auto-centré.

La personne qui n’a jamais eu de voiture va au contraire rationaliser ses déplacements, privilégier la proximité et étudier ce qui est accessible.

On ne peut pas partir du principe qu’un produit aussi inaccessible qu’une voiture (prix, condition physique, capacité à conduire, etc.) puisse être indispensable à la vie de tous.

Et j’encourage ceux qui se posent la question « mais comment faire sans voiture ? » à se rapprocher des personnes qui n’ont pas la possibilité d’avoir une voiture et qui ont adapté leur vie à un espace humain et non à un espace transhumaniste qui n’est pas voué à devenir la norme mais à rester un luxe.

« Ça serait sûrement mieux en voiture »

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La plupart du temps, l’automobiliste imagine que parcourir certaines distances à vélo est compliqué si l’on ne possède pas une condition sportive hors du commun. C’est évidemment très compliqué pour certains d’entre eux, mais le nombre d’automobilistes s’imaginant les efforts demandés est bien au-dessus de ces cas particuliers.

Il s’imagine également que faire un trajet à vélo expose aux intempéries 90 % du temps. Il ne s’imagine pas une seconde que se trouver sous la pluie pendant un trajet aussi régulier que le trajet domicile-travail est assez rare et que les jours de pluie vraiment gênante (vêtements détrempés à l’arrivée en cas d’oubli de protections adaptées) dépassent rarement le nombre de 5 par an … dans le pire des cas. (Constat personnel en région parisienne et en région nantaise pour des trajets de 20 min en moyenne sur plusieurs années).

Tout cela n’est pas un reproche : il semble logique d’appréhender et de s’imaginer un tas d’idées façonnées par un mélange de craintes, de préjugés, d’expériences de jeunesse difficiles, de on-dit et de satisfaction de sa situation propre. Mais l’automobiliste étant avant tout humain, une sorte d’empathie faussée par ses idées biaisées lui fait parfois prendre en pitié les pauvres cyclistes affrontant le froid et le vent pour arriver à destination.

Je ne compte plus les fois où l’on m’a très gentiment proposé de me raccompagner en voiture car ça serait sûrement « beaucoup plus agréable pour moi » et que pour une fois, il fallait que « j’en profite ».

Que répondre alors ? La proposition part d’un bon sentiment, c’est évident, mais elle implique plusieurs choses :

– que je considère mon trajet à vélo comme désagréable
– que j’utilise un vélo par dépit et non par choix
– que ce même trajet serait plus agréable en voiture

Or, ces trois conditions ne peuvent être imaginées que par un esprit qui appréhende le vélo et qui se fait une représentation complètement faussée de la réalité sur ce point.

On comprend donc qu’il lui sera difficile de tenter autre chose que l’automobile pour ses déplacements, son esprit ayant classé tout autre type de déplacement comme à fuir par tous les moyens et l’automobile comme réponse à tous les problèmes.

Il en vient alors à imaginer un monde où tout ce qui toucherait à l’automobile serait idéal et tout ce qui toucherait au vélo serait lié à la fatalité.

« J’ai crevé sur la route » -> « C’est le problème avec le vélo »
« On m’a coupé la route » -> « ah ça, les accidents de vélo »
« Une personne a malencontreusement accroché son cadenas à mon vélo » -> « ça n’arriverait jamais avec une voiture »

Ainsi, en voiture, on n’a pas de panne, on n’a pas d’accident et il n’y a pas d’incivilités liées à des stationnements gênants.

Ces situations sont relativement rares et ne sont que des exemples mais sont systématiquement relevées et appuyées pour prouver le fait que le vélo est un moyen de transport lié à de très nombreux problèmes et qu’il semble parfaitement inadapté aux trajets utilitaires.

Chaque cycliste a au moins vu un automobiliste avoir un léger sourire dès qu’il a évoqué un problème survenu sur un trajet à vélo.

Mais lorsque l’on parle d’embouteillages, de coût des déplacements, des difficultés de stationnement et autres joyeusetés de l’automobile, on constate souvent qu’il s’agit de la situation normale, « qu’il faut bien faire avec », que la « vie n’est pas toute rose » et « qu’ainsi va la vie, que veux-tu ? ».